Je me trouve actuellement dans le Kérala, état du sud de l’Inde où je fais, pour la 4e fois dans ma vie, l’expérience purificatrice d’un « Panchakarma
Panchakarma
Les cinq pratiques de purification de l’Ayurvéda.
Pancha karma : cure Ayurvédique de soins intensifs dont le but est de purifier et régénérer le corps en profondeur. L’objectif est de débarrasser la physiologie des problèmes chroniques. Cette cure de plusieurs jours doit être adaptée au problème de chaque patient.
», appelé plus communément « cure Ayurvedique ».
Confortablement installée dans un beau fauteuil en rotin à deux pas d’une large et paresseuse rivière bordée de cocotiers, de mangroves et de pâturages, le temps ralentit au fil des jours pour enfin s’arrêter dans le moment présent.
L’Inde est un pays qui se voit, se sent, se touche, s’entend, se goûte... Tous mes sens sont en éveil, ouverts aux messages de la nature, de mon corps, de la vie, de l’univers...
Au fil de l’eau qui coule comme au ralenti, un martin pêcheur m’éblouit un instant de son iridescence bleutée. La pirogue d’un pêcheur, accompagné de son fidèle héron à la proue, apparaît en amont puis glisse lentement sur le miroir de l’eau. Je lève la main et récolte un sourire d’une blancheur inouïe assortie au plumage de l’oiseau ami. Le rythme lent de sa pagaie s’éteint doucement sur son passage, puis disparait.
Un discret Zéphir froisse un moment les frondes des cocotiers et soudain une grosse noix tombe sur le chemin avec un claquement sec avant de rouler sous mes pieds. Ce n’était pas mon heure !
Sur l’autre rive, une vachette rebelle échappe à son gardien qui la poursuit, tente de la feinter, elle ne se laisse pas faire, repart dans l’autre direction, il la suit, elle revient, fait mine de se laisser enlacer, puis redémarre à nouveau. Il finit toutefois par l’attraper et l’attache à l’ombre du cocotier. La course est finie, le divertissement aussi.
Trois petits matous passent en courant, qu’ont-ils vu pour se presser autant ? Un gecko appétissant ? Un rat palmiste bien dodu ? Il est vrai qu’il ne doit pas faire bon vivre dans un hôpital Ayurvédique pour un minou !
L’heure du déjeuner se faisant attendre, je retrouve la sensation perdue du temps long. Elle me rappelle mon enfance. Je prends le temps de revisiter cette enfance, à travers mes yeux de mère, de femme mûre, et je revis en les savourant les instants marquants, les joies et les peines qui m’ont façonnée.
Je me laisse distraire par les chants d’oiseaux, dont certains n’ont de « chant » que le nom ; hululements, caquettements, gloussements, sifflements stridents, piaillements, pépiements, roucoulements, croassements créent un fond sonore envoûtant. En Malayalam (la langue locale) « corbeau » se dit « Kakka », l’enfant intérieur s’en amuse.
Et les chiens aboient parce que quelqu’un au temple là bas quelque part dans la forêt tropicale a décidé d’allumer 10 pétards en même temps que l’église sonne la messe.
Voilà le cadeau inespéré d’Ayu – la vie – celui de renouer avec l’ami le temps, que je ne voyais plus passer. Ce n’était pas faute de lui courir après, et j’avais parfois peur de l’avoir définitivement perdu.
La jeune doctoresse, que j’ai surnommée « Morning Glory » (« gloire du matin », le nom que l’on donne au liseron bleu en anglais), tant elle resplendit de bon matin dans ses saris aux tons éclatants, vient s’asseoir quelques minutes à mes côtés, je lui confirme que j’ai dormi comme un bébé, mangé comme un bébé et éliminé comme un bébé. Nous rions ensemble et elle me fait part de la philosophie de ce petit hôpital de 9 chambres, niché dans la verdure… chaque patient doit être traité comme un membre de la famille, une mère, un grand-père, une tante. Je caresse sa joue si douce, lui réponds comme il est bon d’entendre cela, de séjourner dans ce havre de paix où tout est mis en œuvre pour que le processus de guérison puisse avoir lieu.
Ce sera bientôt l’heure d’aller rejoindre la petite salle à manger où Mohan le chef aura préparé à chacun et à chacune un repas selon les besoins de la cure. Pour ma part, je peux en ce moment profiter du « normal food », c’est-à-dire de légumes, de riz, de sauces délicieusement épicées à base de noix de coco, d’un poppodum (un sel !)et d’un verre de lait caillé. Les vaches se trouvent de l’autre côté de la rivière dans la petite ferme bio qui appartient à l’hôpital. Mais c’est beaucoup moins drôle lorsqu’on est à la diète !
Comme nous ne n’avons que quelques pauvres mots en commun, j’ai inventé un langage qui amuse beaucoup notre chef. A chaque plat, je décerne un nombre de « miams ».
Ce mois-ci ce sera donc une recette 4 miams (miammiammiammiam)que je partage avec vous. Les ingrédients seront simples à trouver en France mais la saveur sera assurément kéralaise. Environ une fois par semaine* nous avons droit à une petite douceur. Celle-ci est inventive et simple à préparer. Elle fera un petit déjeuner léger, ou un goûter sain pour les enfants (et les grands).
Douceur riz coco
Ingrédients pour 1 personne :
1 tasse de flocons de riz
½ tasse environ de lait de coco ou de crème de coco afin que les flocons soient enduits mais restent un peu secs et se décollent
2 cuillers à café de noix de coco râpée (facultatif)
2 cuillers à café de sucre de coco
Mélanger tous les ingrédients.
Ce goûter sympathique peut se manger aussi bien avec les doigts qu’avec une cuiller et remplacera (à mon avis) avec brio les goûters industriels pour les enfants.
* Ma cure Ayurvédique aura duré 23 jours. Pendant ce temps j’aurai reçu entre trois et quatre soins différents par jour. Une journée type commence par un cours de yoga très doux à 6h (tout le monde n’en profite pas, mas je suis assidue car je ne voudrais pas perdre ma masse musculaire) et se termine vers 21h lorsque la nuit est tombée et que la fatigue se fait sentir. Je repartirai reposée, allégée, régénérée et ralentie. A moi de jouer maintenant !
> Vanessa Gheorghiu, Educatrice de santé selon l’ayurveda, membre d’AEF