Des montagnes russes du mois d’octobre, oscillant entre automne frais et été indien voire mousson tiède, les forêts sont sorties enflammées d’or et de pourpre et la moisson des feuilles a bien commencé. Dans les forêts, les prairies et les jardins, la transformation est à l’oeuvre, celle qui fera des surplus relachés l’humus odorant des graines du printemps. L’Ayurveda nous dit que Pitta Pitta Humeur biologique du feu est en aggravation en ce moment, en nous et dans notre environnement, et comment ne pas le voir dans les couleurs qui prennent le regard pour s’éteindre ensuite dans la sécheresse, toute eau embrasée, toute vie descendue dans les tréfonds ?
Se rafraîchir le corps mais pas les pieds...
Avant le froid qui peut commencer à la nouvelle lune du 11 novembre, le corps a encore besoin de se rafraîchir et de s’apaiser : si les pieds doivent être gardés à l’abri de la rosée et du froid matinal éventuel, une douche quotidienne ou une baignade dans l’eau fraîche peuvent permettre de retrouver une circulation, une présence, une fraicheur... que les écarts de températures et la tiédeur avait pu nous faire perdre. Pour ne pas avoir de sensation de froid, on peut se frictionner avant, ou courir, sauter à la corde, ou faire son yoga ou son ménage du matin, à moins de sortir naturellement comme un pain tout chaud de son lit ; et se frictionner sous l’eau froide, quitte à sortir et revenir. Les
hommes se baigneront particulièrement le bas du corps, les femmes plus particulièrement la poitrine et les épaules.
Si au détour des premiers froids le rhume nous prend, si on a le cou un peu raide, les idées un peu fixes ou tournicotantes, le sommeil ou les fleurs difficiles... un bain de pieds sinapisé nous permettra le soir de redescendre en nous-même, sur le plancher des vaches, là où finalement tout est doux. Pour cela, il suffit d’acheter des graines de moutarde noire au rayon graines à germer des magasins bio. On prépare une bassine d’eau chaude et au dernier moment on y ajoute deux à trois
cuillerées à soupe de graines de moutarde écrasées. L’apaisement est quasi immédiat, avec une certaine béatitude. Les pieds ne sortent qu’au bout de 20 minutes, quand les graines les ont rendus tout rouges. Deux fois par semaine au maximum.
En Inde, c’est l’époque de l’année où les hommes reçoivent une onction de la tête au beurre clarifié.
C’est valable chez nous aussi. Le vendredi soir, on peut s’enduire la tête de ghee
Ghee
Beurre clarifié
, et laisser reposer jusqu’au dimanche, avant de se rincer, si possible avec une lotion à base de saponaire, ou une autre alternative qui n’agresse pas le cuir chevelu. Cela pose, apaise.
Châtaignes, verdures et fruits … au ghee Ghee Beurre clarifié
Que ce soit pour les journées tièdes et humides, ou pour celles qui fleurent bon l’hiver et les soirées au coin du feu, la châtaigne rôtie, qui fut une base de l’alimentation, est un précieux allié. Comme tout ce qui est rôti ou grillé, elle permet de se rassembler. En Touraine, on a coutume de la consommer avec la bernache, du moût de raisin en cours de fermentation, qui aide à la digérer. Elle peut être plus facile à éplucher, et plus onctueuse, si on la met 30mn à four chaud sans la percer,
avec un couvercle par-dessus pour éviter les éventuelles projections. Mais on peut aussi consommer des pommes de terre au four en robe des champs, des crumbles, des tourtes, des tartes sablées, de l’orge rôtie, des fruits cuits dans leur peau ou récoltés après les premières gelées, dégustés avec du beurre clarifié et du miel...
C’est aussi le moment des verdures, peut-être les dernières avant l’hiver s’il est froid. Epinards et bettes sautés au ghee, salades sauvages, roquette, mâche, frisée, laitue rouge... Elles peuvent pacifier les soirées, quand la chaleur du jour se relâche dans le corps, ou les journées de grand appétit.
Si l’embrasement domine et que l’appétit fait rage, une infusion de racine de guimauve le soir avant de dormir, un porridge tout doux au lait végétal, du beurre clarifié en abondance sur la nourriture, ou le matin à jeûn (une cuillerée à soupe d’huile d’olive en terrain aride), pacifieront les flammes et nourriront la douceur. Les fruits, acides et astringents, de saison, permettent, eux, d’échapper aux écoeurements et à l’absence d’appétit : pommes, coings, poires, cormes, grenade, baies d’épinevinette...
sans oublier les très astringentes prunelles et les arbouses.
Texte et photos Florence Pomana
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